Millésime 2017

Grand Cru Sommeberg Domaine Zind Humbrecht

Présentation du millésime

L’hiver 2016/2017 très doux et sec provoqua un débourrement précoce des vignes étalé entre fin mars et début avril 2017. Le vignoble prenait déjà une teinte verte à la mi-avril et il était possible de voir 3 à 4 feuilles bien ouvertes par rameau sur gewurztraminer, cépage habituellement précoce au débourrement. La pousse rapide aura au moins permis de minimiser les dégâts occasionnés en cette période par les mange-bourgeons. Malheureusement, deux vagues de froid en provenance du nord-est traversèrent la France à une semaine d’intervalle. L’Alsace fut surtout touchée par la première vague entre le 21 et 22 avril, avec des températures autour de -3°C. L’effet du gel fut catastrophique. Sous l’effet d’un vent d’est, beaucoup de vignobles ont souffert de gel, surtout ceux habituellement protégés par les vents qui descendent les vallées et empêchent le froid de stagner, comme par exemple le Herrenweg sur Turckheim. Mon père, ayant pourtant vécu plus de 60 millésimes, n’avait jamais vu de dégât de gel sur certains lieux-dits qui pourtant avaient gelé en 2017. Il aura aussi été possible de constater que le Gewurztraminer est bien un cépage qui n’aime pas le froid, la plus grosse perte étant constatée sur ce cépage. En une matinée, nous n’avons pu récolter que 42hl sur 7 hectares de Gewurztraminer (du jamais vu !). A l’opposé, le Pinot-Gris a moins souffert avec seulement 50% de perte en moyenne. Il est probable que la structure cellulaire plus molle du Pinot-Gris, à l’opposé de celle du Gewurztraminer plus rigide et dure, aura permis aux cellules de changer de forme sous l’action du gel/dégel sans éclater. Au moment du gel, les doubles bourgeons étaient déjà sortis sur beaucoup de vignes. Il n’était donc plus possible d’espérer une récolte sur la croissance ultérieure de ces bourgeons.

 Le risque accru de gelée noire est probablement la conséquence la plus néfaste du réchauffement climatique en viticulture. Une vigne fortement touchée par le gel met aussi beaucoup de temps à se remettre du choc, et la croissance des bourgeons latents se fit seulement courant mai. Bien plus tard dans l’année, il était possible de voir le manque de rameaux et feuilles des pieds les plus touchés. Ce stress énorme, associé à la perte de récolte, aura aussi eu une influence majeure sur l’induction florale qui explique la très grosse récolte 2018 de l’année suivante. Le Clos Häuserer est probablement la parcelle du domaine la plus sensible au gel à cause de sa situation en cuvette en pied de coteau et à l’abri des vents. Heureusement, une taille très tardive (fin mars) a retardé le débourrement et surtout, les bois ne furent liés qu’après le gel. Le fait d’être éloigné du sol aura protégé les jeunes pousses du gel. Le Clos Häuserer a donc produit une récolte quasi normale. Une expérience riche en enseignement pour les années futures…

 Début mai, petite frayeur sur le Brand avec une grêle qui heureusement est restée sans conséquence. La floraison s’enclenche rapidement dès la fin mai sur les sols précoces mais s’étale jusqu’à mi-juin suite au stress du froid d’avril et aussi quelques pluies éparses à ce moment. Il est possible de voir des grappes avortées, surtout sur Gewurztraminer, qui partent en vrilles. Les deux dernières semaines de juin et le mois de juillet sont caniculaires, provoquant les premiers stress hydriques sur les vignes les plus sensibles. A nouveau, la qualité de l’enracinement (vieilles vignes, travail du sol), le niveau de récolte ainsi que le soin de la vigne font la différence. Début août est plus clément et le vignoble prend un très bel aspect, favorisé par les rendements faibles de 2017. Les températures grimpent à nouveau fin du mois et la progression des maturités est fulgurante. La première parcelle fut récoltée le 29 août (Pinot-Gris Roche Roulée) suivie dans la foulée par des terroirs comme le Rotenberg, Heimbourg, Goldert… Une petite pluie le 2 septembre ne fait qu’accélérer les maturités. Les rieslings furent récoltés à parti du 11 septembre et les températures baissent rapidement pour tomber mi-septembre à 5°C en nuit. Nous terminons les vendanges avec le Rangen, Hengst et Clos Jebsal le 26 septembre.

 La faible récolte 2017 aura au moins permis à la vigne de très bien résister aux épisodes de chaleur et de sécheresse durant l’été. Le choix de la date de récolte était primordial, car si certaines parcelles ont pris du retard à cause du gel, d’autres ont su mûrir très rapidement. La récolte fut très saine, seul le Clos Jebsal aura vu le développement de pourriture noble. Les vins de 2017 ont des équilibres de grands vins, souvent caractérisés par de belles acidités et des pH bas ou normaux, les maturités sont normales sans excès. Malgré la précocité du millésime, les vins ont fermenté plus lentement que d’habitude, sans doute à cause de la densité et de la structure du millésime (et non pas à cause d’une richesse en sucre excessive). Certains vins ont bénéficié d’un élevage plus long comme la plupart des Pinot-Gris. 2017 est un grand millésime qui devrait confirmer ce statut par un beau potentiel de garde.

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